Francine CARON, née l'année charnière d'Hiroshima et de la libération des camps nazis, écrit depuis 1965. Elle est aussi universitaire et revuiste (sa revue NARD, en 30 numéros, a publié 375 poètes, dont 97 femmes).
Dans ses 50 titres parus depuis 1973, qui interrogent la « poésie féminine », elle veut traduire l'Eros ou... l'Espagne, ainsi que ses voyages de par le monde, voire « la Nature », l'enfance ou le mystère animal, du lyrisme premier au haïku, sa récente recherche en « forme fixe », des plus actuelles.
Elle a publié 7 livres de bibliophilie : le premier, Cathèdres (en 1977, année de son prix Villon), chez Marc Pessin ; puis à TranSignum, dirigé par Wanda Mihuleac, en édition bilingue ou trilingue : Shoah (en 2007), Goya Goya ! etCantate pour le Grand Canyon (en 2009), Bleu Ciel d'Europe et Entre deux Rembrandt (en 2010) ; Taj Mahal (en 2011) et mène une réflexion sur la traduction littéraire avec sa traductrice américaine, Basia Miller.
Elle est présente dans les anthologies poétiques chez Seghers, Hachette jeunesse, La Table ronde, Nil, Pauvert, ou en éditions universitaires chez Ellipses et chez Hermann (Paris, 2010).
Sur le thème de la Loire (cf. anthologie Orion dans Beauté de la Loire et de ses châteaux, 2010), sa «Loireleï» figure aux Presses universitaires d'Angers (1989). Elle est l'une des quatre poètes femmes présentées dans le « Tute de damas » (au sens de carré de dames), publié par les Presses universitaires de Cadix (2007), id est, dans l'ordre du volume, Hélène Cadou, Nicole Laurent-Catrice, Francine Caron et Ariane Dreyfus.
Voici quelques poèmes inédits de Francine Caron :
CHARRETTE
Transport de Veaux,
En bétaillère à trois étages,
Le soir dans les campagnes vides.
Leur « beu-eu » tragique,
aux carrefours
de brusque stop,
de brusques chocs.
À l'heure où les bons cœurs
regardent (à la télé)
l'abattoir des polars
« Route Odette », au Bois de Vincennes
« Emouvantes vieilles gens, dont je ne fais pas encor partie (on campe bravement sur un os étrange). Brinquebalant sur cannes, penchés / maladroits, sous chapeau coloriant canitie / calvitie, fragiles égale humbles, on ne voit qu'eux si l'on croise patience, rage, souffrance. Si l'on croise un espoir de sourire.
Il leur faut s'adapter à être balayés, déblayés, rejetés hors décor. Aciers rouillés, ferrailles que tassent des camions vers la décharge.
D'autres diraient qu'ils sont vieil or parant souvent les arbres, éclairant le regard de leur sagesse (supposée), dans l'ultime survie de quelque liesse. »
(inédit du vendredi 29 octobre 2010).
TOMBEAU DE FELIX
I
Tes yeux-merveilles. Dans la nuit d'émeraude.
Tes oreilles, grêlées de graines. Trouées par un chien, poinçonneur des Lilas.
Les branches de lilas, tu les escaladais, apparaissant soudain, conspirateur avide à la fenêtre.
Tu te reconnaissais dans le miroir. Fier de connaître un tel secret.
Familier demeuré au paradis d'enfance. Couronné d'animale passion.
Fourrure intacte, largement étalée ... ayant cessé d'être irriguée - . Fleurant lavande (et son huile essentielle) comme il n'est pas permis.
L'incarnation, cette splendeur. Entrer dans les Mille et Un luxes de la chair.
Reconnaissance à l'Orient pour l'encens.
Que ne viennent /PAS ENCOR/ les insectes. (Ta charogne, leur proie de choix - Ta beauté à bientôt dévorer.)
Que ne suis-je grand prêtre d'Egypte pour inciser ton ventre, retirer les viscères, obturer les vases canopes. Et te garder de dos, ainsi enseveli dans ton sommeil.
Pour t'inhumer : chausser les sandales d'avril - Celui-ci, celles-là qui virent célébrer de petites fiançailles de terre.
Et soudain, tout s'enchaîne. La Mort revient, grands coups de bottes, la pelle à la main, te chercher.
II
Rejoindre les morts dans leur lieu. Là où ils stagnent. Encor - Là où nos souvenirs persistent, révèlent...
Pas de sang. En toi pourrissant - C'est moi qui l'ai perdu - Coupure.
On pense avoir pleuré « toutes les larmes de son corps ». Il en est tant - Nous, comme un océan de nuit.
Pour d'aucuns : « dépouille ». Je crois les connaître ces rêves, qui toujours te traversent.
III
TA géométrie // Cercle lové Cercle sombre // à la lune pleine
(inédit de mi novembre 2010, revu et corrigé en 2011)
Traduction anglaise de Basia Miller, assistée de Francine Caron :
I
Your eyes, those marvels. Through the emerald night
Your ears, pocked with seeds. Perforated by a pooch as if by the tichet-puncher at the « lilacs »
You'd scramble up the lilac and suddenly appear at the window - avid conspirator.
You recognized yourself in the Mirror. Proud to have such a secret.
Household pet, ever in the paradise of childhood. Crowned with animal passion.
Your pelt, intact, lies loose, lacking the flow of inner ointments. Smells immoderately of lavender (and its essential oil).
How splendid the Incarnation. Entry into the thousand-and-one luxuries of the flesh.
Gratitude to the Orient for incense.
May the insects not come ... yet. (They'll find your corpse, their favorite prey, and soon consume your beauty).
O that I were a High Priest of Egypt, incising the belly, removing the viscera, sealing the canopic vases. And keeping you with your back to me, thus entombed in your sleep.
For your burial : I don the sandals of april, witnesses of our lovely and earthly engagement.
Suddenly everything falls into place. Death returns for you, stamping her boots and wielding her shovel.
II
We must meet the dead where they reside. Where they rest. And where our memories remain and reveal.
No blood (it rots in you). I'm the one who lost it. A simple cut.
We think our eyes have wept all their tears. So many have been shed. We are like the océan of night.
For others, just your husk lies hère. But I think i know the dreams that still pass through you...
III
YOUR geometry // Dark Circle Complete Circle // beneath the full Moon.
Pour un TOMBEAU DE FELIX
LA VIE ... VIEILLESSE
« A force de vivre / onze ans / depuis l'adolescence / soit : cent trente deux mois ... quatre mille jours ! avec une dame très ancienne, tu avais cent connaissances humaines, acquis mille et une finesses.
Tu savais la douceur, la lenteur à petits pas (plus tard : un appareil), la voix chaude du temps des caresses, le journal étalé sur la table pour ces bonheurs, le sourire (au matin) de l'accueil, la réprimande (molle) devant telle incartade, le partage du jardin quand elle prenait place (en saison) sur chaise de bois déglinguée (un peu de peine encor à se pencher pour te flatter), sa tristesse lors de tes fugues (jusqu'à deux nuits), ses appels, ses questions aux pêcheurs le long de la Marne, sa Joie toute mâtinée de peurs aux réapparitions ... Ou les larmes tièdes tombées sur ton cou, quand tu remontais (ALORS) de la mort.
Tu n'oublias jamais l'odeur d'infirmerie / de la plaie / de l'ulcère / de tout ce qui rongeait - Et la vision sans cesse des gants de caoutchouc - Et comme, un dur matin de froid / après remue-ménage / montées-descentes incessantes d'hommes patauds, elle était - jour après jour - disparue de ta vie. »
(inédit de janvier-mars 2011)
CHARTRES
« FEU
des joyaux de nuit
des grands dessins qui fusent
Feu du soleil qui fut qui entrelace
Et l'Histoire est contée
le haut rêve
l'Hal/lucination neuve
Parle-moi de tes cercles de tes siècles
de tes demeures de tes flèches
où le Roman s'élève
où la Rose culmine
et cependant voilée
Rien qu'un mirage
Rien qu'un sillage
foulé par tant de vies
(Les pieds souffraient
Tous les pas dansent !
Les silex
aux chariots
s'apaisent
Vitraux qui souri/ez
Des bleus de gloire
amènent
à la Vierge seconde
et blanche
et majesté
Cependant
que la grotte re -
- cèle l'or et Vibre »
(inédit du 19 mars 2011).
FRANCINE CARON (suite)
un CHOIX DE brefs POEMES
1- Poème du 1er/ 1/ 1967 à l'ami Eugène (Guillevic), publié dans "En Vers et pour tous" de 1974 : Terre en gloire
2- Poème à rêver en forêt : Pays d'entour du 10/ 9/ 1980, in "Picardie-Poésie" de 1981 & in "D'Europe" de 1998
3- Poème de Bretagne, in "Terres Celtes" de 1985 : extrait d'Iliennes (cf. aussi "Bretagne au coeur" et "Atlantiques")
4- Poème(s) d'Egypte, in "Egyptiennes" (par. 2000) : Néfertiti & Tombe de Nakht de 1981
(cf. aussi in "Voyage autour du monde en poésie")
5- Poème(s) de la douceur d'aimer, in "Femme majeure" (prix Villon 1977) et Ces chemins ((du baiser)) in "Bonheur désarme" (1975)
6- Poème de la douleur d'amour, in "L'Amour le Feu" (1991)
7- (3 mini-)poèmes 2007 de l'enfant aux Doudous, in "Haïkus" des mêmes (publiés en 2010)
8- Poèmes en prose 1997 & 2000 des Batignolles, in "Petit Guide du Square" (1re éd. 2000; 2e augmentée 2001) : Manège & Avis de tempête au siècle
dernier
9- Poème d'Espagne 1982 Corrida, in "Sur sept tableaux de Caillaud d'Angers" (2 éditions 1999 & 2000, présentant 8 traductions en allemand, anglais, espagnol, puis en hongrois,
italien, tchèque)
10- Poème du 17 mai 1975 : Oradour, in "D'Europe" (1998). Et in "Shoah", ouvrage de bibliophilie trilingue illustré par Maria Emdadian paru en 2007 aux éditions Transignum
11 b- Poème(s) du Louvre, in "Grand Louvre" bilingue franco-allemand (2010) : L'adoration des Bergers (du printemps 2008, d'après Georges de la Tour) / Cf. aussi 11 a :
"Musée du Louvre" paru en 1984; reproduction ici de La Victoire de Samothrace de février 1981 /
12- Poème d'un paradis terrestre créé le 8/ 6/ 1974, in "Le Paradis terrestre" (prix Froissart 1976)
(cf. aussi "Jardin de Simples" de 2007, avec Vu & V. Q. et Galet datant de l'été 2004)
13- (trois) poème(s) d'un patio angevin, en sept. 2000, in "Tanka du cloître angevin"(paru en 2001)
14- Poème Epicentre du 9/ 7/ 1980 sur un volcan, in "D'Islande" (1982)
15- Poème parmi les plus anciens, in "Orphée sauvage" de 1973 : Dimanche (du 11/10/1970)
16- (brefs) Poèmes picards, in "Grandeur Nature" de 1989, soit trois décoordonnées d'août et sept. 1978
17- Poème en écriture automatique du 6/ 7/ 1975 (extraits X et XI) pour un avatar de la Fée Mélusine (dite "MéluZine", titre 2000). Première publication sous le titre général de "Nautonière"
(parution 1978) puis amplement remaniée
18- Poème sur un air de rêve (Jean-Michel Jarre), in "Quinze ans de poésie" (1981), soit : Oxygène datant du 25/ 6/ 1979
19- Poèmes sur une pré-naissance (30/ 12/ 2000), in "Parent(hèse viscér)ale" de 2001. Et son contraire > un malaise dans la civilisation : Au-dessus du volcan de 2003
issu de "Planète Foot / War Planet" (de 2004)
20- PLUS : Un poème de Paris, in "Parcs et Lunaparks de Paris" : Vacance au Luxembourg - Création & parution 2006.
21- (trois) poème(s) des ciels, in "Ciel-Symphonie" (2006) : Cycle du printemps ou Le tendre soleil & Le destin navigue
22- (deux) extrait(s) > haltes I et V du Grand Canyon, in "Cantate" du même, ouvrage de bibliophilie paru en 2009 avec 7 linogravures de Pierre Cayol (éds Transignum)
23- Un poème du monde, in "Taj Mahal" d'août 1982 (1er verset). Autre livre de bibliophilie paru en 2012 avec trois gaufrages de Maria Emdadian (éds Transignum)
24- Poème en prose : Corps atomique, de l'été 2012 (11 août), à lire d'une seule émission de voix. Il s'agit d'un appendice à "Riches Heures du sexe amoureux" (paru en 2012), publié
dans le "Manifeste atomique" créé par Martine Rigo-Sastre, en complicité avec Michel Capmal & Jean-Marc Thévenin aux éds Voix Tissées, Paris 2013.
25- Venezia col tempo ou "Venise avec le temps" > inclus dans le livre d'art "Beauté de Venise" qui présente 2 nouvelles variantes par rapport au texte initial du 10/ 10/ 1969, publié en 1981
in "15 Ans de poésie" - Ici, reproduction de cette page - Un poème traduit en italien.
26- Un poème sur le poète du 23/ 5/ 1980, in "Picardie-Poésie" de 1981.
Soit un ensemble de 26 textes brefs, pour la plupart (poèmes, haikus, proses), écrits de 1967 à 2012.
Ce CHOIX correspond au confluent de la volonté et du hasard. Le télescopage des temps étonne parfois l'auteur ... sinusoïdales cependant, serpentant de la beauté à l'horreur, à la joie ou à
l'espoir.
1
TERRE EN GLOIRE (3 strophes)
- Je veux le monde épanoui
entre une terre et ses torrents
et la grappe du jour nouveau
entre nos doigts pour l'égrener
- Je veux une marée d'ogives
et la courbe de la lumière
la ride absente de ton front
- Et je veux la table dressée
sur les os de nos errements
passés. La nuit déjà déserte :
(Ier janvier 1967; à Eugène GUILLEVIC)
* * *
2
POEME à RÊVER EN FORÊT (5 strophes)
- Pays d'entour
où s'élèvent les âmes légères des fantômes et des biches
Une frontière translucide le sépare
du royaume des hommes
- Il fait forêt au vent bruissant des fûts
des centenaires jeunes
et des lierres moussus des gravelles
paissent au long de leurs flancs
- Des éventails nous bercent
ou des mains nous bénissent
et l'odorat s'éveille
entre des sentes à senteurs
d'impalpables soeurs vertes
- Que savions-nous ? Un tronc tombé
est un soleil sensible
et les géants disent tout à la fois
l'humilité et la splendeur
- Et nul ne les verra monter
sans sa mesure
sans sa mémoire
enfouie au fond des lymphes ou des chevaux
* * *
3
ILIENNES
La mer sensible à remous bleus
bruite de source et s'entrechoque pleine
azurite marbrée roue d'étoiles
Sommeil des flots où l'on sombre porté
bercé en des mailles de lune
des filaments ou des cheveux marine
Peut-être des sirènes se formant
en des flux de liquide dessinées
en des bains immortels de renaissance
* * *
4
NEFERTITI (du Musée de Berlin)
Reine au profil parfait
sous la Tiare du monde
- Equilibre entre diagonales de plâtre -
Cependant chair vivante
col sensible
décapité de charme bleu
&
TOMBE de NAKHT
FEMMES
à jamais rêvées sur de la pierre
dans la simplicité du trait qui fonde
se donnent -comme fleur- la Connaissance
offrent des libations aux vivants et aux morts
* * *
5
(LE BAISER)
Ces chemins dans ta bouche
Quel passeur de châtaignes
pour gagner la forêt !
(ou de)
BONHEUR DESARME
Tu viens après l'amour
le corps ailé
les yeux bleuis- en verte plénitude
Conjuguée à l'amour
et de là
infinie
* * *
6
L'AMOUR LE FEU
J'écris pour te parler de mes silences
J'écris d'amour et par sa déchirure
J'écris comme ma main qui te caresse
J'écris où des larmes me viennent
J'ai tant besoin de te guérir avant la mort
J'écris pour être ta musique - Là
* * *
7
TROIS HAIKUS DES DOUDOUS
Humour nécessaire
dans ce monde désastreux
Plus : un coeur d'enfant (1 b)
+
Havre de chaleur
Compagnon de poésie
Pégase de laine (3 a)
+
Orphelin blessé
tu incarnes dans tes yeux
les enfants du monde (9 b)
* * *
8
AUX BATIGNOLLES
AVIS de TEMPËTE au SIèCLE DERNIER
Comme la Nature
vomissait les transgressions humanoïdes à son encontre, en déchaînant les vents / les eaux / les feux, le petit Square avait subi le choc d'un Noël délétère.
Le pire avait été évité grâce à la répartition judicieuse des immeubles, le protégeant par leur carré ouvert au Sud. Mais, pour l'amateur de jardins, le beau "cabinet de verdure" avait été
chaviré dans sa disposition (... de nouvelles clairières) et dans ses chants.
Des musiciens estimèrent, à l'oreille, que de nombreux migrants : merles moqueurs, grives grivoises, romantiques rossignols, fauvettes picardelettes, s'en étaient retournés dans leur campagne
-Sans doute, elle aussi, menacée ...
Seul le poète Dierx, Réunionnais, resta soudé au Paris de son Parnasse.
+
MANèGE
La grande affaire
des femmes, du moins les recluses dans leur appartement, était le Ménage. Mais ensuite, tout au plaisir de sortir avec leurs bouts de chou, on changeait -ni vu ni connu- de voyelles, et la corvée
du ménage devenait ... la joie du Manège.
Ce bonheur d'un parcours circulaire offert aux moins de 11 ans ! entre les panneaux coloriés, les lampions, les klaxons, les animaux pimpants des crèches d'autrefois, que l'on pouvait prendre
d'assaut sans se faire mordre. C'était l'Âne, le Cheval et la Vache, voire même les véhicules des grands : du Vélo à la Moto ... Ou à l'Avion, naturellement interdit aux moins de trois pommes.
Pour 4 francs le tour, 30 francs les dix, on entrait dans le paradis des faux départs, stridentes sonneries, adieux désespérés. Car il y avait de véritables douleurs quand on ne voyait plus pères
et repères, ou plutôt mères et remèdes : "Papa, Maman, Anaïs !", hurlait ainsi une enfant abandonnée. Et des parents, apparemment souriants, mais crispés en-dedans,
scrutaient les expressions de ces pionniers - Que ferait leur progéniture ? ... "plus tard" ...
Or d'un seul élan le manège révéla les destins :
Des fillettes s'envolèrent sans davantage se tenir, étalant leurs prouesses. Un rouquin éperdu étreignit de tout son corps la barre d'appui. Les futurs champions de Formule
1torturèrent le volant. Deux énarques des années 2010 -la soeur et le frère - montrèrent qu'ils s'ennuyaient à mourir, sans leurs jeux vidéo. Tandis qu'un futur présentateur TV criait de joie
et distribuait des "BONJOURS" à l'assistance ! Plusieurs enfants semblaient porteurs d'un très vieil âge. Certains parents regrettaient de ne pouvoir entrer dans la ronde ...
... quand, brusquement, le tour cessa - Alors un énorme sanglot retentit : Je veux Z'emporter mon cheval !!!
* * *
9
CORRIDA
Parfois
la pique s'égare
et ça
CRIE
dans la cavalcade saillante des paupières
Le rouge étrangle le théâtre
et le cheval comme une infante
dans ses atours forcée.
L'Espagne entière éclate
* * *
10
ORADOUR
Grand chant d'oiseaux
Force des feuilles
ICI le soleil est si calme
Mais les murs ruent d'angoisse
mais le sang colle
Ah fusiller les abeilles et les morts
Les corps se mêlent
comme jamais avant
LES ENFANTS BRULENT ! ! !
N'avoir jamais aimé - Ni mis au monde
(Cassé/e de larmes
étouffé/e par les cris
tu ne peux plus supporter les visages)
* * *
(de) 11 a
VICTOIRE de SAMOTHRACE
Où la femme s'envole
au mouvement offerte
- Centre des Vents
& 11 b
L'ADORATION des BERGERS (d'après Georges de la Tour, nouveau poème 2008)
Un cercle réuni
dans l'essentiel des signes
(Jeune et vieux couples - Le "ravi")
L'agneau flaire l'enfant sanglé
dans un sommeil de fève
* * *
12
Poème du PARADIS TERRESTRE
la Joie de juin
s'accomplit dans les chaumes
la terre danse à sa merci
les vaches font
leur marché d'herbes
les champs vernis sont leur délice
de petits villages apparaissent
les hirondelles les cisèlent
le ciel est comme
un jour de chance
on en oublie les cycles les moteurs
des poules
blanches s'ébouriffent
elles misent sur leur parure
chaque arbre tend
son bouquet de vertige
on voit des coq'licots en escalade
et le Blé fort
signe sa route
et rit dans l'aire
(OU)
VU et V.Q.
L'WAZO familier d'Orphée
prend pour cabinet d'aisances
les feuillets du PWET !
Sa chiasse violette :
encre d'un sonnet
de bel acabit ...
(ET)
GALET
caillou ovale,
pomme de terre miné-
rale, tu étonnes la paume
par ta douceur. T'entailler ?
le couteau n'en peut mais.
Tu es intégrité, fidélité au
Temps, que seule érode la
très-lente patience
(Ce poème sans titre est dédié à l'aïeule picarde inconnue : Berthe Caron, née Gallet)
* * *
13
TANKA
Dans l'oeil égyptien
ouvert sur ce mur
d'autres voient salpêtre
Le mur
ne dit pas : la mort
Mais la mer !
+
Tous les amis qui sont partis
/ depuis la poussière /
nous regardent
au soleil suffisant
pour voir renaître
les oiseaux
+
Flash éblouissant
la disparue de plus d'un siècle
veille
Renée
d'une infinie soirée
d'octobre
(note de l'auteure : ma mère est morte le 21 octobre 1989. Sa soeur se prénommait Renée)
* * *
14
EPICENTRE (une identification au volcan)
Comme une
bête
dans un paysage de torture
où elle s'est toujours connue
et elle monte
entre cratère et lave éteinte
sentant son coeur semblable aux pierres brunes
son vieux coeur qui fléchit
au tam-tam de la terre
et elle sait du fond
le feu armé
la fusion des matières transmissibles
aspirant au dehors d'air fulgide
la terre-jet ah la terre phallique
la nuit des temps
ancêtres de poussière
la vie solide qui hurle d'artifice
Erupter et
couvrir et tuer
mater l'ombre
frapper le soleil noir aux yeux déments
maudissant maudissant en doigts d'encre
en bouillie de cailloux
la ville grège
et se donner la mort
à se vomir
en mégatonnes de tephra de croûtes
tout le sang bouillonnant de ses ténèbres
jusqu'au repos passager
des offices
* * *
15
DIMANCHE
Jour inouï
tu sommeilles j'y porte les mains
c'est la fleur éblouie des regards qui alimente les sources d'ombre
Sérénité
d'impuissance on découvrait tes plis vertigineux
on te nuançait de mordorures
on simplifiait l'immense
Voici que
s'installe un marché de printemps
les rues sont fleuries de carrosses
l'automne fête de rouille les collines où nous allons
LE MONDE EST
ROI
TOUT S'INAUGURE AU CRI QUAND TU DECHIFFRES
Tout se parsème
Soient les
fleurs de l'espoir non cueillies
les cyprès incertains
l'aube parcourue sans partage
le présent ininfiniment suffisant
Dimanche
inassouvi de sève
tu modules tes hêtres
tu déchires de splendeur
tu écartèles
* * *
16
GRANDEUR NATURE
Parler du
vent
dans les feuillages
de ses caresses bleues
Et nul ne voit qu'il passe
hors les oiseaux
*
Parfois le noyer s'endimanche
- Feuillage fauve au bois blanchi -
*
Chanter avec l'oiseau
pour clamer territoire
orée des ailes
et la ferveur d'aimer
*
Etre d'été
au midi qui rayonne
Etre un autre soleil
*
Guetter les feuilles
au pur instant de transparence
Au passage des fées
* * *
17
MELUZINE
(X)
le Forgeron
viendra
avec
un sceptre de genêts
°
elle ouvrira
il a sa main sur les barreaux
°
TIRER LES JONCS
POUR QUE LE CHAUDRON
TONNE
EN DES GLAS SOMPTUEUX
°
Elle s'appuie aux grès
Le temps lui faut
Ce soir : oublier la pendule
Elle sonne les grâces
au gré de son propre cadran
(XI)
Elle serpente
par la lune
elle clame dix fois la montagne
huit fois le sang
une Son nom
°
Elle chasse au harfang
comme un signe
à Celui qu'elle aimait
* * *
18
OXYGENE
sur Oxygène de Jean-Michel JARRE
(Note fc : un poème à entendre dans l'audition conjointe du morceau de musique cité, tel qu'il fut écrit)
1 - Parfois
l'horizon tremble
et c'est la bulle intense
qui lève et s'amplifie
se perdant en nacelles
en ocelles de flou
- Lors le chant
de la femme vient
s'offre et se mélange de siècles
entre des nostalgies qui se diluent
et s'extasient d'aurores rondes
- Point d'orgue
noir
peut-être la tempête
ou dieu aux séraphins
Des contractions de cercles qui s'exclament
des chocs de lunes
des cris de météores
et ce balancement tissé de palmes
vers un point qui
titille
et le tam-tam serpente
qui bat comme ton coeur
et des feux d'artifice se dispersent
- Tam-tam des
astres
et tout se danse
dans le miaulement des fusées
Oh ! Vie qui jouit
Majesté nue
déflagrante de sang
- Des nuits
froissées vont dépliant
et nous la jeune écharpe des humains
rentrons par la musique
dans les orbes
dans les ordres de l'éternelle foi
car Tout est tout
et l'Un et son Contraire
- Couple du plein du vide
alternance des bras
et la mer qui gravite
Largesse
Naissante l'arche
est jour
parfaitement légère et recueillie
Parfois des architectes
2 -
Appel Appel
à vénérer à être
ouvrir le sexe l'âme
force d'amour qui luit
ô langues de joie qui pardonnent
ô pieds volants de crêtes
et le nom de la mort :
balbutiement baroque à flancs d'oiseaux
- Lente
décantation des routes
les hautes et les basses
pour qu'en ce pur
repos
claquent les mains
brillent les yeux
broient les mâchoires
tangue toujours la Vie
dans le reflux
3 - Lame des
vagues
sur l'humble plage humaine
- Et le chant du soleil recouvre
et prend la peine comme joie
effleure tout
dans l'infini Mystère et l'infinie Réponse
RESPIR DU MONDE
* * *
19
SAINTETE de la femme enceinte
... je suis des yeux l'amie en longue robe blanche,
grosse de Vie,
si forte de sa constance à porter poids précieux
ancré, proliférant en elle,
Elle ...
de stature fine cependant, délicate.
Tellement émouvante maintenant par cela même :
le nouvel équilibre qu'elle recherche -
Arquée - Tendue
vers l'avenir de son fruit
Fille devenue l'Arbre
(à une jeune Amie "porte-joie", à l'égal (!) d'un certain Pierre du même nom ... directeur de la revue "Le Temps parallèle")
+
"AU-DESSUS DU VOLCAN"
(Une "niouze" - Ici, présentation du 1er paragraphe sous forme de prose "poétique")
Le K.M.O. ou Corps du Monde Occidental était malade. Il n'avait, en principe, "que du bonheur",
santé, argent, biens de consommation purement matérielle, nécessaires ou martelés par la pub.
Et même en excédent. En excellent excès,
de sorte qu'il fallait beaucoup jeter : jeunes, jobs et autres joujoux avariés. (...)
* * *
20
VACANCE au ... LUXEMBOURG
(Jardin de Marco Polo, Fontaine Médicis de ce parisien Palais)
Le Luxembourg c'est
5 ou 10 événements
par imag'-seconde
°
Nos yeux-photographes
informent du faux du vrai
nos bouches-témoins
°
Invitation douce :
Ouvrir les mains comme feuilles
vers la bonté chaude
(extraits du dernier poème composé de haïkus : ici les 144 à 146 - certes "rythme" 5 / 7 / 5)
* * *
21
CIEL - SYMPHONIE
Cycle du printemps
Le vent brasse les nuages
Hanches de lumière
(OU)
Le tendre soleil
illumine mille houppes
à son poudrier
(ET)
Le destin navigue
Jupiter enlève Europe
... Naissent continents
* * *
22
DEUX TEMPS (et haltes au) GRAND CANYON
(I)
Le nom de Ce qui nous dépasse
et nous sommes vivants
face aux châteaux d'argile
(l'esprit rêve d'un choeur inouï
pour ce saisissement ce rituel d'aube)
---
Pieds nus sur une terre au vent violet
tête ceinte des plumes des nuages
Et comme un officiant offrant l'encens
*
(halte V)
Des levers d'aube
en plein midi
quand les canyons brûlent d'ivoire
* * *
23
TAJ MAHAL
(I)
Voûte rouge du monde
précédant le bijou
les secrets d'échancrure
la rigoureuse proportion
le creux le plein des bulbes
dans un sacre d'ivoire
veiné d'humain à peine
en versets d'un Coran musical
* * *
24
CORPS ATOMIQUE
Bienfait pour nous des jambes (z')ouvertes (z')enserrées autour
de tes hanches tes branches talonnant (t')aussi le ba -
lancement rivière au ventre orage aux seins précipités dans
la digue des bras sorellité Frater ! des (z')yeux le bref
moment béni en riches (z')heures (z')en découlant où tout
s'accorde à l'univers uni le sang ayant gagné les plus fines
ramures les plus tendres bronchioles éclairant la moindre
caverne joie électrique de clef étincelante profondeurs
volcaniques profondeurs explosives éclairs de Zeus à la
Terre d'Hadès à l'Eau des Néréides le sexe encore
éparpillé écarquillé Sexe de forge Sexe natal Sexe à
jamais jeune du monde
(à lire d'une seule émission de voix, sans oublier les -e faussement "muets")
25
VENEZIA COL TEMPO
Francine Caron,
« Venise avec le temps », (inédit, 2011) :
C'est toujours
vers toi que je reviens / malgré
l'affleurement d'ardoises / malgré
le meurtre des images / malgré
les marches de l'oubli / malgré
le calice immobile /
malgré ... bon gré
Maison dorée de mes amours
te balance chaque gondole
AVEC LE TEMPS ... AVEC LE TEMPS
AVEC LE TEMPS
Sang glauque
les yeux se lèvent souterrains
Au loin rugir
colonnes mutilées de pourpre
L'orage court
juge le doge agenouillé
Chien Roch
tes pieux rongés comme des os
Hurle sirène
Tintoret s'écartèle
et sous les flots
pâle équidistante de ma mort
VENISE
Venise
immense amour
La nuit a dévoré l'ultime
* * *
26
POETE
Le poète
semblable à l'arbre
s'édifiant par la sève
sous les terres
lancé à tous poumons
dans la clarté
Debout
essayant d'être libre
jusqu'à la durée de la mort
LES TEXTES de RECENTE PARUTION (2000 à 2008) SONT PUBLIES AVEC L'AIMABLE AUTORISATION DE LEURS EDITEURS
:
Alain Benoit (Rochefort du Gard) pour Le Square des Batt' /sic !/, Donner à Voir (Le Mans) pour "Jardin de simples" et "Haïkus des Doudous", La Jointée (Boulogne sur Seine) pour
"Parcs et Lunaparks de Paris", Les Amis de la poésie de Bergerac pour "Egyptiennes", Les Dossiers d'Aquitaine (Bordeaux) pour "Planète Foot War Planet", L'Oeil pour l'Oeil (53) pour
"Ciel-Symphonie", Orion (Nantes) pour Venise, Transignum (Paris) pour "Cantate du Grand Canyon" & le Taj, Verlag im Wald (Allemagne) pour "Grand Louvre".
Note DLR : Il va sans dire que le choix pour l'auteur a été des plus difficiles car déjà, de 1965 (> premiers poèmes "pour le tiroir") à 1982, on en compte un petit millier. Ce faisant = le
lecteur curieux pourrait juger des différences de tons, de styles, sur quelque 40 ans d"écriture
On découvrira d'autres poèmes en consultant le fichier des TITRES. Tout comme le site de Silvaine ARABO correspondant à l'an 2000. Ainsi que quatre coups de coeur de Jean-Pierre DESTHUILLIERS, webmaster de l'hypersite Adamantane